Pierre-Olivier Carles

November 30, 2023

Entreprendre entre dogme et pragmatisme...

Il ne vous a pas échappé qu'Elon Musk, sur scène et en direct, a littéralement envoyé les annonceurs qui boycottent Twitter, sur fond de ses déclarations jugées antisémites, se faire foutre avec un inéquivoque “Go f*ck yourself!".

Nous aurions tous aimé voir la tête de Linda Yaccarino à cet instant précis. 😅

Et tous les observateurs sont d'avis que cette envolée lyrique va potentiellement coûter à Twitter quelques milliards de dollars de chiffre d'affaires dans les prochains mois.

Mais je ne crois pas que cela arrivera.

Car, en business, il n'y a qu'un seul juge de paix : le marché.

Tous les annonceurs de Twitter vont se poser la question de savoir s'ils gardent une relation avec la plateforme ou pas.

Certains dogmatiques, qui ont largement embrassé le wokisme, comme Disney par exemple, ont déjà tranché. 

D'autres, plus prudents, attendent de voir comment tout cela va tourner en mettant leurs campagnes en pause. 

Enfin, les derniers, bien plus pragmatiques, vont mettre leurs budgets là où le rendement est le meilleur - au sens large incluant ROI, branding, etc. - sans se préoccuper de sujets plus sociaux ou politiques, et potentiellement chez Twitter s'ils y voient un intérêt.

L'opposition entre dogme et pragmatisme dans le monde de l'entrepreneuriat est un sujet fascinant et complexe.

En tant qu'entrepreneur, j'ai souvent été confronté à cette dualité.

D'un côté, le dogme, avec ses principes rigides et ses idéologies fermes, peut servir de boussole morale et orienter une vision d'entreprise. De l'autre, le pragmatisme, axé sur la flexibilité et l'adaptabilité, est essentiel dans un environnement commercial en constante évolution.

Un exemple concret de cette tension peut être observé dans la manière dont une entreprise approche sa stratégie de croissance.

Un entrepreneur dogmatique pourrait s'en tenir strictement à sa vision originale, refusant de s'écarter de son idée initiale, même face à des preuves évidentes qu'une adaptation est nécessaire.

En revanche, un entrepreneur pragmatique serait prêt à ajuster sa stratégie, à expérimenter et à apprendre de l'environnement pour assurer le succès et la survie de l'entreprise.

Cependant, il est important de noter que ces deux approches ne sont pas nécessairement mutuellement exclusives.

En effet, les entrepreneurs les plus réussis trouvent souvent un équilibre entre les deux.

Ils possèdent la capacité de rester fidèles à leurs valeurs fondamentales - un trait souvent associé au dogme - tout en étant ouverts aux changements et aux adaptations nécessaires - une caractéristique du pragmatisme.

C’est ce que Killian et moi essayons de faire avec Nimbus.

Du côté du dogme, nous souhaitons produire et assembler nos suspensions en France et privilégier des circuits aussi courts que possible. Nous le faisons principalement par conviction, mais pas seulement. Cette position n’est pas vraiment négociable, et on peut parler de dogmatisme.

Cependant, si les conditions de production en France devaient devenir intenables à cause d’évolutions drastiques du cadre légal, ou d’autres changements brutaux que je ne peux même pas imaginer, nous pourrions reconsidérer cette position car, à mes yeux, la survie de l’entreprise et la poursuite de sa mission priment sur le reste.

C’est là que se trouve NOTRE équilibre entre dogme et pragmatisme.

Et potentiellement, chacun va mettre ce curseur où il le souhaite.

Je pense que c’est pareil pour Twitter.

Elon Musk a les moyens de faire vivre Twitter pendant 50 prochaines années sans engranger 1 dollar de revenus s’il le souhaite. Ils vont donc transformer la plateforme en suivant sa vision - et, à ce stade, peu importe que nous y adhérions ou pas - pour en faire un produit que, de leur point de vue, le marché va adorer.

S’ils réussissent, les marques seront pragmatiques, et investiront en masse sur Twitter. Et il est même possible que d'autres sources de revenus viennent tout simplement remplacer la publicité.

Parce que le marché a souvent tort à l’instant T, mais toujours raison sur le long terme.

Les grandes marques qui, durant la Seconde Guerre mondiale, ont collaboré avec les Nazis se comptent par centaines.

Elles existent toujours, et vous les connaissez.

Vous achetez même leurs produits, soit parce que vous avez oublié, soit parce que vous ne le savez pas, soit parce que la valeur de ce qu’elles offrent est suffisante pour avoir votre clientèle, soit parce que vous n’en avez rien à foutre.

Pourtant, on parle bien de sociétés complices du nazisme, et indirectement de tout le mal qu’il a fait, comme l’Holocauste par exemple.

Comme disent les Stoïques, tout finit par passer, le meilleur comme l'abominable.

Au final, plutôt que d'opposer dogme et pragmatisme, je pense qu'il peut être plus raisonnable, pour un entrepreneur, de chercher à intégrer ces deux philosophies.

Cela permet de bâtir une entreprise résiliente, capable de maintenir sa vision et de rester lisible par ses clients comme ses équipes, tout en s'adaptant efficacement aux réalités changeantes du monde des affaires.







About Pierre-Olivier Carles

De mon parcours fait d’entreprises, d’investissements, de succès et d’erreurs, je tire des pensées personnelles que je partage ici, en français maintenant. Documenter ce voyage peut en inspirer d’autres, mais, à vrai dire, c’est d’abord à moi que cela apporte quelque chose.